Alors qu’à l’heure de la rentrée, notre dossier se concentre sur l’éducation positive et sur la façon dont les parents peuvent respecter leurs enfants dans l’expression de leurs désirs et de leurs talents, je reste envahie par l’impression kafkaïenne qui m’a submergée lors de mon retour de vacances. Je venais de me couper du monde pendant presque trois semaines. Passant d’une randonnée avec un groupe d’amis dans l’Atlas à des balades sur la côte de sable fin de Sidi Kaouki ou à quelques flâneries dans les ruelles de la médina d’Essaouira avant de rejoindre les derbs trépidants d’animation de Marrakech et la douceur enveloppante de notre riad. Bien blottie dans le siège de l’avion qui me ramenait vers Bruxelles, je tentais de me reconnecter à l’actualité en parcourant la une des journaux et les titres du moment. Alors que l’avion quittait les côtes marocaines pour survoler la Méditerranée, la réalité est revenue en blocs de textes abrupts : « Entre janvier et juillet, 66 000 migrants et réfugiés ont débarqué sur les côtes italiennes », annonçait le journal Le Monde. « Un chiffre qui dépasse déjà celui de l’année 2013, pour laquelle les autorités italiennes en avaient compté 42 000. La quasi-totalité de ces personnes sont parties de Libye par voie maritime ». « Par ailleurs, un sixième des personnes arrivant en Italie par voie maritime sont des enfants, notait l’organisation humanitaire Save the Children, dans un rapport daté du 26 juin. La majorité d’entre eux sont Syriens et Érythréens. Seuls ou en famille, ce sont des populations particulièrement exposées lors de la périlleuse traversée de la mer Méditerranée. Depuis 2000, au moins 23 000 personnes sont mortes en mer Méditerranée d’après le rapport d’Amnesty International, publié le mercredi 9 août. » Cette mer, frontière au cœur de l’Europe, infranchissable pour certains, dont bon nombre d’enfants, je la passais sans même m’en rendre compte, prête après la détente et de beaux moments conviviaux, à retrouver le confort de ma vie bruxelloise. Prête aussi à boucler ce numéro dans lequel figure un dossier qui prône une éducation plus positive pour rendre nos enfants plus heureux. La vie est, bien sûr, faite de contrastes, mais j’ai réalisé en quelques secondes l’importance fondamentale de s’informer, d’ouvrir son esprit, d’ouvrir son cœur aussi.
Entre aide humanitaire et surveillance des frontières, l’Europe oscille, débordée par ce flux ininterrompu de personnes qui cherchent refuge. Or, nous ne pouvons pas vivre en quarantaine, dans une Europe assiégée de toutes parts, nous ne pouvons pas ignorer qu’à travers le monde, des millions de réfugiés, de migrants ou de demandeurs d’asile sont confrontés à une situation humanitaire critique. Nous ne pouvons pas restreindre leurs mouvements et les priver d’aide. S’il est légitime que nous visions notre bien-être et le bonheur de nos enfants, nous pouvons aussi accorder un regard positif à ceux pour qui la question de l’éducation ne se pose pas, tout occupés qu’ils sont à lutter pour leur survie, à assurer leurs besoins de base que sont boire, se nourrir et s’abriter. Des citoyens du monde se mobilisent tel, récemment, Fred Wilbaux, initiateur du projet
« Tournai refuge », qui, en lisant des réactions hostiles ou méfiantes face à l’arrivée de migrants à Tournai, a lancé via les réseaux sociaux une grande opération de parrainage des réfugiés. Ou encore l’artiste autrichien Raoul Haspel qui a créé une minute de silence vendue en hommage aux migrants, morceau le plus vendu sur iTunes Autriche. Chacune et chacun, nous pouvons poser un geste, initier ou soutenir une action, et surtout poser un regard bienveillant sur celles et ceux, déraciné(e)s, qui demandent refuge.

Impossible ? Mais non, positivons !

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