C’est ce qu’ont scandé celles et ceux qui se sont réunis devant La Bourse de Bruxelles le lendemain des attentats du 22 mars. Au sentiment de solitude qui nous assaille après un événement dramatique succède en effet un besoin rapide de se tourner vers les autres.

Par Christiane Thiry

Pris dans la tourmente de la violence, les émotions nous débordent et nous portent à nous ouvrir et à exprimer la façon dont nous avons perçu les événements et les pensées qui nous traversent. L’exacerbation de cette parole échangée crée une dissolution des frontières et un sentiment profond de communion. Et le fait de manifester des sentiments positifs de solidarité et d’empathie permet une résilience collective indispensable pour continuer à vivre.

Dans un mouvement spontané, bon nombre de personnes se sont rassemblées sur la place de la Bourse. Des enfants accompagnés de leurs parents sont venus y déposer dessins et mots de soutien. Tel ce grand cœur rouge d’une petite fille et sa légende : je vous aime, destiné aux personnes décédées et aux blessés. Des travailleurs de Brussels Airport sont venus à la Bourse pour partager leur douleur et affirmer leur credo : on est tous ensemble malgré les différences et on s’aime. Des étudiantes et étudiants en communication sont venus apporter des câlins. Épaule contre épaule contre la terreur.

Des quatre coins du monde ont jailli de multiples marques de solidarité : la tour Eiffel a enfilé les couleurs belges tout comme la porte de Brandebourg en Allemagne ou la pointe de l’Empire State building à New York. Les minutes de silence se  sont égrenées dans un même désir d’hommage aux victimes et de recueillement. Les réseaux sociaux ont hissé le drapeau belge et revisité toutes les icônes de notre pays : de Manneken Pis à Tintin ou au Chat de Philippe Geluck.

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La Belgique est en deuil mais l’esprit belge n’est pas mort comme en témoigne l’invitation « Faites des frites pas la guerre ». Ou, encore, l’émission radio L’union fait la farce qui a rassemblé humoristes et chroniqueurs pour revenir de manière décalée sur les événements tragiques du 22 mars. « Nous les Belges, on aime l’absurde, alors même si parfois nos blagues n’ont pas de chute, on continuera à en faire en attendant la leur », a proclamé Charline Vanhoenacker sur les ondes.

Vivre, c’est laisser parler son cœur et ses émotions et c’est aussi continuer à rire ! Comme l’ont affiché sur le tableau de leur classe de jeunes étudiants liégeois : « Une journée sans rire est une journée perdue ».

Tous unis, avec du rire et des larmes, pour remplacer les armes. Tous en lien pour ne pas  nous diviser et stigmatiser une communauté qui n’a rien à voir avec cette sauvagerie. Quand cette tentation m’effleure, je pense à Nourredine et à Nadia et au merveilleux accueil qu’eux et leur équipe m’ont toujours réservé dans l’Atlas marocain ou dans la medina de Marrakech. Merci à tous deux de me garder les yeux et l’esprit ouverts.

Ériger des murs, fermer des frontières, tenir des propos haineux ne résoudra rien. Il faut construire un autre monde. Un monde juste, solidaire, respectueux, un monde qui donne du sens à la vie.

Tous ensemble.