Désolé, mais la science ne nous épargne rien. Il ne suffisait pas que Copernic nous prive de l’illusion de jouir d’une position centrale dans l’univers, ni que Darwin fasse de notre humanité une conséquence banale de l’évolution, ni que Freud nous apprenne que nous ne sommes pas maîtres dans notre propre maison, voici qu’une équipe française1 nous démontre que cette fameuse « éjaculation féminine », ce fabuleux Graal tantrique, n’est tout compte fait qu’une simple émission d’urines ! Quelle déception ! Exit la « femme-fontaine » et bienvenue à l’incontinence urinaire orgasmique…

Les réalisateurs de cette étude ont recruté sept femmes connues pour émettre de façon récurrente une importante quantité de liquide (le recueil lors de l’expérimentation ira de 15 à 110 ml) pendant la phase orgasmique. Elles ont accepté d’être observées avant et après une stimulation sexuelle avec (n=5) ou sans (n=2) partenaire. Une échographie pelvienne fut pratiquée dès le démarrage de l’expérimentation après miction volontaire (US1) et pendant la phase de stimulation sexuelle juste avant (US2) et après (US3) l’émission fontaine (‘’squirting’’ en anglais). Les analyses biochimiques ont concerné les urines avant stimulation (BeforeSU) et après le squirting (AfterSU), ainsi que le liquide de squirting lui-même (S).

Chez toutes les participantes, US1 a confirmé la vacuité vésicale au début de l’expérimentation. Après un temps variable (25 à 60 minutes) de stimulation sexuelle, US2 a montré un remplissage vésical conséquent. Le contrôle US3 a révélé ensuite une vidange complète de la vessie après le squirting. Les analyses biochimiques ont montré la même composition urinaire banale pour le liquide orgasmique (S) que pour les échantillons BSU et ASU. La participation marginale d’une sécrétion de la prostate féminine est également démontrée, sans qu’elle soit systématique. Les analyses biochimiques ont, en effet, retrouvé une faible concentration de PSA (antigène prostatique spécifique) dans l’échantillon Squirting et AfterSU chez cinq des sept participantes, alors que ce PSA était absent chez six d’entre elles dans l’échantillon BeforeSU.

La conclusion est sans appel : l’éjaculation féminine correspond bien à une miction involontaire orgasmique ou périorgasmique. L’excitation sexuelle semble permettre un remplissage vésical rapide, ce qui explique le caractère peu coloré et peu odorant de l’émission urinaire. Le liquide prostatique n’est que marginal, comme l’anatomie l’a toujours fait penser, puisque les glandes prostatiques résiduelles féminines sont très peu développées.  Le versant subjectif de cette expérience-fontaine reste à explorer et semble extrêmement variable. Alors que certaines témoignent de la nécessité d’un lâcher-prise absolu et décrivent une jouissance quasi extatique dont elles sont particulièrement fières, d’autres la vivent comme une sévère humiliation qu’elles ne souhaitent surtout pas revivre. Alors que certaines s’inscrivent dans de coûteux stages tantriques en espérant découvrir ainsi cette belle ouverture de leurs chakras les plus intimes, d’autres demandent de l’aide pour éviter ces intempestives inondations coïtales. On sait, par ailleurs, peu de choses encore du vécu des partenaires. On entend là aussi des témoignages qui vont de l’admiration au dégoût en passant par tout ce que peuvent mettre en scène les fantasmes les plus variés. La révélation de la véritable nature de ce phénomène-fontaine va-t-elle en modifier la perception subjective au féminin et au masculin ? D’autres études seront nécessaires pour alimenter nos réflexions. À suivre, donc.

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1. Nature and Origin of ‘’Squirting’’ in Female Sexuality. S. Salama and coll. J Sex Med 2015;12:661-666