Je suis séparée du papa de Jade depuis plus de 7 ans. Elle a 12 ans et je l’ai eue presqu’à temps plein jusqu’à présent. Maintenant, elle vit à mi-temps chez son père et chez moi. Il a refait sa vie avec une femme qui n’a pas d’enfant et je suis très énervée car elle se permet de faire des commentaires sur l’éducation de ma fille. Jade m’appelle souvent lorsqu’elle est chez son père et me raconte tout ce que dit sa belle-mère. J’enrage….
Fabienne, 40 ans
En effet, Fabienne, il y a de quoi enrager d’avoir tant donné pour se voir ensuite jugée et si mal reconnue. Si votre agacement tout à fait compréhensible est légitime, nous n’avons cependant sur lui et cette situation qu’assez peu de prise. Et pourtant … Votre fille vous appelle tous les jours pour vous raconter ses malheurs et les multiples jugements de sa belle-mère. Non seulement ce discours empoisonne sa vie là-bas, mais en plus, il parvient jusqu’à vous par son intermédiaire. Qu’elle soit peinée et préoccupée est une chose, qu’elle ait envie de vous en parler, peut-être, mais ce dialogue quotidien avec vous l’aide-t-il vraiment ? Ne met-il pas surtout beaucoup d’huile sur le feu ? En vous mettant dans sa vie de là-bas, en vous communiquant ce qui s’y dit, elle mélange les lieux, les situations et les personnes. Vous voilà avec elle en ligne, lorsqu’elle se trouve là-bas, et sa belle-mère, toujours par les ondes se retrouve dans votre salon. Pourquoi ? Serait-ce une façon d’alimenter le conflit, de vous aider à vous défendre, de trouver une raison pour ne pas vous lâcher lorsqu’elle est chez son père ? Ne pas vous en parler permettrait de donner moins d’importance à l’événement, et peut-être de le laisser se dégonfler. Or là, et elle et vous, donnez à ces paroles peu relevées voire même injurieuses la place principale. Pourquoi leur faire tant d’honneur ? Plutôt que de mettre au cœur de vos conversations ce thème douloureux, si vous le jetiez un peu plus loin comme une mauvaise herbe qui contamine votre joli jardin ? Lâchez cette ortie urticante et prévenez votre fille, « attention, ça pique, ne m’apporte pas ce bouquet d’orties, mais plutôt quelques fleurs ». Ne pas prendre en plein cœur ces tiges douloureuses, ce n’est pas abandonner Jade, mais lui montrer comment laisser tomber ce qui ne nourrit pas, et orienter votre écoute de maman sur ce qui épanouit votre enfant. Qu’il est difficile de ne pas se battre contre l’inaudible, et pourtant, avec ou sans mots de votre part, ce discours ne changera probablement pas. Alors, pourquoi ne pas regarder ailleurs, écouter ailleurs, et inviter votre fille à faire de même ? Peut-être l’absence d’écho permettra à ces paroles toxiques de s’étioler ?