Entre effluves d’air du temps qui mènent notre société par le bout du nez et notes intimes qui nous reconnectent à des souvenirs in utero, le parfum se révèle un outil précieux pour développer sa confiance, son aura, pour mettre l’accent sur sa compétence, son dynamisme au travail, pour (re)séduire. Conseils facettés de la créatrice du concept de Stylisme olfactif(R), Olga Alexandre.

Par Isabelle Blandiaux

Un jardin – celui de notre enfance ou celui qui fleurit dans notre imaginaire dès que le printemps revient, couvert de rosée, planté d’arbres fruitiers. Voire une forêt toute en effluves boisés, un potager où poussent, sur un lit de notes vertes, une rhubarbe croquante, des herbes aromatiques en pagaille… À moins que ce ne soit un voyage qui emmène le nez vers des sillages mystérieux comme celui de l’oud, ce bois sacré protecteur du mauvais oeil et du diable dans les pays arabes. Ou un voyage dans le temps qui nous reconnecterait à nos racines, à la rencontre de l’ancestral accord chypré, composé de mousse de chêne, d’accents ‘sous-bois’, poudrés, poussiéreux…

Tous ces parfums qui nous flattent les narines en ce printemps sont des signes de notre époque et de l’inconscient
collectif. « Nos préoccupations sont de plus en plus écologiques, donc nous apprécions des senteurs qui nous rapprochent de la terre, de la nature », analyse Olga Alexandre, docteur en neuropsychiatrie et biochimiste ‘cosmétologie parfumerie’. « Un nouvel ingrédient venu d’ailleurs et qui amène une touche d’exotisme peut aussi déclencher une mode comme ce fut le cas pour l’oud il y a peu et le patchouli dans les années 70. De manière générale, au plus une société va mal et au plus les odeurs aimées sont sucrées pour compenser le mal-être. Un réflexe qui reproduit la consolation par le bonbon durant l’enfance, le réconfort par l’alimentaire. Les jus fruités gourmands sont très présents actuellement, d’autant que nous aimons tous les fruits et que le but de la parfumerie commerciale reste de plaire au plus grand nombre. Le retour des colognes l’an dernier peut traduire un élan vers une vivacité, un dynamisme, celui des parfums boisés actuellement, le besoin de se réancrer bien droit sur ses fondations, celui des chyprés l’envie de se rassurer dans un cocon enveloppant. »

À chacun sa bibliothèque d’odeurs

Si l’air que nous respirons porte les accords de certaines aspirations communes à l’échelle sociétale, notre sens olfactif est avant tout facetté par notre histoire personnelle et intime dès les premiers moments de vie, dans le ventre de notre mère. « L’odorat est complexe et extraordinaire. C’est le premier sens activé chez les nouveau-nés après l’accouchement : le bébé sait sentir grâce à la bibliothèque olfactive qu’il se crée à partir du goût dès le 5e mois in utero. Dans beaucoup de cas, on aime ou on n’aime pas une odeur mais on ne sait pas pourquoi. Ce n’est pas relié à un souvenir conscient mais souvent à un souvenir de la toute petite enfance ou de la vie foetale. » Partant de ce constat, encouragée par la puissance et la rapidité avec lesquelles les fragrances nous pénètrent au plus profond via le cerveau reptilien qui gère les émotions et les souvenirs sans passer par l’intellect, Olga Alexandre a mis au point une méthode de développement personnel en séances individuelles, en plus des ateliers qu’elle anime en groupe sur des thèmes tels que ‘Le parfum de votre personnalité’, ‘Parfum et séduction’ ou ‘Le goût du parfum’. « J’ai remarqué plusieurs fois que les personnes étaient profondément touchées au cours des ateliers, parfois en larmes. Une odeur peut réveiller des traumas enfouis. Comme je suis docteur en neuropsychiatrie et biochimiste ‘cosmétologie parfumerie’, j’ai pu réagir de manière opportune dans ces situations-là. Et cela m’a amenée à proposer le concept de Stylisme olfactif(R) depuis deux ans. Cela commence par une discussion, on va vers la profondeur de vie de chacun : l’enfance, les relations avec les parents, les grands-parents… Et on voit quelles senteurs sont associées à certains moments ou certaines personnes. »

À lire aussi  LE CIRQUE DES FEMMES: un spectacle par des femmes sur les femmes ...

Tests psychosensoriels

Aussi au programme de ces séances intimistes, des tests psychologiques : associer des mots à des couleurs, choisir des textures d’étoffes à l’aveugle selon le bien-être ressenti, évaluer sa part de féminité/virilité exprimée, partager ses émotions à la vue de photos de paysages… « En analysant ces échanges, je propose à la personne de travailler sur certaines zones. Et on choisit ensemble les directions que nous allons emprunter d’un point de vue psychologique : améliorer sa confiance en soi, développer son aura, mieux se protéger, calmer ses angoisses, raviver son couple, faire accepter son autorité au travail, être reconnue -pour une femme- dans un milieu professionnel masculin… » Nous avons les yeux bandés d’abord (parce que la concentration est plus intense) puis les yeux ouverts, lorsque Olga Alexandre nous fait sentir plusieurs jus de sa boutique Parfum d’Ambre1 qui regorge de fragrances niches composées par des artistes. Elle nous demande d’élire les senteurs qui nous apportent telle ou telle émotion. Une garde-robe olfactive (un ensemble de parfums) est ainsi créée pour des circonstances identifiées de la vie (amour, travail…). À la fin, on peut utiliser les échantillons reçus pour traverser certaines périodes plus sereinement.

« Le jus que l’on porte tous les jours est un refuge, un bouclier », explique cette spécialiste de l’olfaction. « Mais il y a une accoutumance et c’est intéressant de se redécouvrir. Ce qu’on était à 18 ans, ce n’est plus ce qu’on est à 30. J’engage les personnes sur d’autres voies pour leur montrer leur singularité, leurs forces. Une fragrance peut déclencher une transformation psychologique et physique, devenir une arme secrète pour résoudre des problèmes extérieurs, de relation avec les autres, ou des problèmes intérieurs. L’entourage va sentir un changement sans pouvoir réellement l’analyser. »

Constatant que chez certaines personnes, ces quelques séances n’étaient pas suffisantes, la neuropsychiatre a poursuivi sa démarche en développant une thérapie par les odeurs depuis le début de cette année. « Les parfums réveillent des souvenirs mais on utilise aussi les odeurs du quotidien (biscuit au lait, oxo…). J’en possède 200 différentes, ce qui me permet de m’adapter aux différentes cultures : un Asiatique n’a pas le même catalogue d’odeurs quotidiennes qu’un Européen. Le goût est composé à 80% d’olfaction et comme on mange tous les jours, on connaît tous ces arômes. Cela peut amener les gens à revivre certains événements de leur vie et je travaille avec eux ces moments par l’olfaction. » Non, le monde des senteurs n’a décidément rien de superficiel ni d’anodin.

1. Parfum d’ambre : 45, rue du Bailli – 1050 Ixelles. 02 852 50 37. www.parfumdambre.be

 

jardin – celui de notre enfance ou celui qui fleurit dans notre imaginaire dès que le printemps revient, couvert de rosée, planté d’arbres fruitiers. Voire une forêt toute en effluves boisés, un potager où poussent, sur un lit de notes vertes, une rhubarbe croquante, des herbes aromatiques en pagaille… À moins que ce ne soit un voyage qui emmène le nez vers des sillages mystérieux comme celui de l’oud, ce bois sacré protecteur du mauvais oeil et du diable dans les pays arabes. Ou un voyage dans le temps qui nous reconnecterait à nos racines, à la rencontre de l’ancestral accord chypré, composé de mousse de chêne, d’accents ‘sous-bois’, poudrés, poussiéreux…

À lire aussi  Je ne sais pas comment annoncer à mes parents et ma famille que je suis homosexuel. 

Tous ces parfums qui nous flattent les narines en ce printemps sont des signes de notre époque et de l’inconscient
collectif. « Nos préoccupations sont de plus en plus écologiques, donc nous apprécions des senteurs qui nous rapprochent de la terre, de la nature », analyse Olga Alexandre, docteur en neuropsychiatrie et biochimiste ‘cosmétologie parfumerie’. « Un nouvel ingrédient venu d’ailleurs et qui amène une touche d’exotisme peut aussi déclencher une mode comme ce fut le cas pour l’oud il y a peu et le patchouli dans les années 70. De manière générale, au plus une société va mal et au plus les odeurs aimées sont sucrées pour compenser le mal-être. Un réflexe qui reproduit la consolation par le bonbon durant l’enfance, le réconfort par l’alimentaire. Les jus fruités gourmands sont très présents actuellement, d’autant que nous aimons tous les fruits et que le but de la parfumerie commerciale reste de plaire au plus grand nombre. Le retour des colognes l’an dernier peut traduire un élan vers une vivacité, un dynamisme, celui des parfums boisés actuellement, le besoin de se réancrer bien droit sur ses fondations, celui des chyprés l’envie de se rassurer dans un cocon enveloppant. »

À chacun sa bibliothèque d’odeurs

Si l’air que nous respirons porte les accords de certaines aspirations communes à l’échelle sociétale, notre sens olfactif est avant tout facetté par notre histoire personnelle et intime dès les premiers moments de vie, dans le ventre de notre mère. « L’odorat est complexe et extraordinaire. C’est le premier sens activé chez les nouveau-nés après l’accouchement : le bébé sait sentir grâce à la bibliothèque olfactive qu’il se crée à partir du goût dès le 5e mois in utero. Dans beaucoup de cas, on aime ou on n’aime pas une odeur mais on ne sait pas pourquoi. Ce n’est pas relié à un souvenir conscient mais souvent à un souvenir de la toute petite enfance ou de la vie foetale. » Partant de ce constat, encouragée par la puissance et la rapidité avec lesquelles les fragrances nous pénètrent au plus profond via le cerveau reptilien qui gère les émotions et les souvenirs sans passer par l’intellect, Olga Alexandre a mis au point une méthode de développement personnel en séances individuelles, en plus des ateliers qu’elle anime en groupe sur des thèmes tels que ‘Le parfum de votre personnalité’, ‘Parfum et séduction’ ou ‘Le goût du parfum’. « J’ai remarqué plusieurs fois que les personnes étaient profondément touchées au cours des ateliers, parfois en larmes. Une odeur peut réveiller des traumas enfouis. Comme je suis docteur en neuropsychiatrie et biochimiste ‘cosmétologie parfumerie’, j’ai pu réagir de manière opportune dans ces situations-là. Et cela m’a amenée à proposer le concept de Stylisme olfactif(R) depuis deux ans. Cela commence par une discussion, on va vers la profondeur de vie de chacun : l’enfance, les relations avec les parents, les grands-parents… Et on voit quelles senteurs sont associées à certains moments ou certaines personnes. »

Tests psychosensoriels

Aussi au programme de ces séances intimistes, des tests psychologiques : associer des mots à des couleurs, choisir des textures d’étoffes à l’aveugle selon le bien-être ressenti, évaluer sa part de féminité/virilité exprimée, partager ses émotions à la vue de photos de paysages… « En analysant ces échanges, je propose à la personne de travailler sur certaines zones. Et on choisit ensemble les directions que nous allons emprunter d’un point de vue psychologique : améliorer sa confiance en soi, développer son aura, mieux se protéger, calmer ses angoisses, raviver son couple, faire accepter son autorité au travail, être reconnue -pour une femme- dans un milieu professionnel masculin… » Nous avons les yeux bandés d’abord (parce que la concentration est plus intense) puis les yeux ouverts, lorsque Olga Alexandre nous fait sentir plusieurs jus de sa boutique Parfum d’Ambre1 qui regorge de fragrances niches composées par des artistes. Elle nous demande d’élire les senteurs qui nous apportent telle ou telle émotion. Une garde-robe olfactive (un ensemble de parfums) est ainsi créée pour des circonstances identifiées de la vie (amour, travail…). À la fin, on peut utiliser les échantillons reçus pour traverser certaines périodes plus sereinement.

À lire aussi  Voyage au cœur de nos blessures grâce aux Constellations Familiales et Rituels du 9 au 14 avril 2016 à Marrakech

« Le jus que l’on porte tous les jours est un refuge, un bouclier », explique cette spécialiste de l’olfaction. « Mais il y a une accoutumance et c’est intéressant de se redécouvrir. Ce qu’on était à 18 ans, ce n’est plus ce qu’on est à 30. J’engage les personnes sur d’autres voies pour leur montrer leur singularité, leurs forces. Une fragrance peut déclencher une transformation psychologique et physique, devenir une arme secrète pour résoudre des problèmes extérieurs, de relation avec les autres, ou des problèmes intérieurs. L’entourage va sentir un changement sans pouvoir réellement l’analyser. »

Constatant que chez certaines personnes, ces quelques séances n’étaient pas suffisantes, la neuropsychiatre a poursuivi sa démarche en développant une thérapie par les odeurs depuis le début de cette année. « Les parfums réveillent des souvenirs mais on utilise aussi les odeurs du quotidien (biscuit au lait, oxo…). J’en possède 200 différentes, ce qui me permet de m’adapter aux différentes cultures : un Asiatique n’a pas le même catalogue d’odeurs quotidiennes qu’un Européen. Le goût est composé à 80% d’olfaction et comme on mange tous les jours, on connaît tous ces arômes. Cela peut amener les gens à revivre certains événements de leur vie et je travaille avec eux ces moments par l’olfaction. » Non, le monde des senteurs n’a décidément rien de superficiel ni d’anodin.

1. Parfum d’ambre : 45, rue du Bailli – 1050 Ixelles. 02 852 50 37. www.parfumdambre.b

Effluves de printemps

1. Eau de Rhubarbe Écarlate de Hermès. La fraîcheur sans hespéridés pour cette cologne signée Christine Nagel.
92€ les 100 ml.

2. Eau du Brésil de Cinq Mondes – Spa Paris. Citron vert, citron doux, eau de coco et cèdre blanc pour le fini velouté de ce jus ultra frais. 49€ les 100 ml
(www.cinqmondes.com).

3. Jardin précieux de Givenchy. Un jardin à la française à l’époque de Marie Antoinette, entre fleurs (rose, jasmin), poire juteuse, bois blonds et muscs. 61,50€ les 50 ml (chez Planet Parfum à partir du 21/4).

4. Le Muguet millésime 2016, collection Les Exclusifs de Guerlain. Cette édition limitée de Thierry Wasser fait la part belle aux notes vertes fusantes, à une rose fraîche et un jasmin charnel. 430€ les 100 ml (chez Place Vendôme
à Wevelgem : www.placevendome.be) 

5. Angel Muse de Thierry Mugler. Un parfum à base de crème de noisette et de vetiver qui ouvre la voie à une nouvelle famille en parfumerie, celle des boisés gourmands. 82,50€ les 50 ml (ressourçable).

6. Vert Malachite de Armani/Privé. Une accroche verte, aqueuse et croquante (orange amère, petit grain), du jasmin sambac, de l’ylang-ylang et du poivre rose au coeur, puis un lys chaud, sensuel, en fond, avec une pointe de vanille et de benjoin. 200€ les 100 ml.

7. Oseille et Thym Citron, Collection éphémère The Herb Garden, de Jo Malone. Avec aussi du petit grain bigarade, du romarin, des feuilles de géranium, de la mousse terreuse. 53€ les 30 ml (chez Senteurs d’Ailleurs :
www.senteursdailleurs.com).

8. Chypre-Mousse de Oriza L. Legrand. Un parfum reconstruit à partir de résidus collectés dans de très anciens flacons.
120€ les 100 ml d’eau de parfum
(chez www.parfumdambre.be).