Tu ne t’en es même pas rendu compte ? C’est incroyable. Je me sens vraiment…
Tu m’avais pourtant dit que tu étais d’accord. Ce n’est pas juste ! Je crois réellement que tu…
Tu as vu ta tête ? Toi, tu as encore eu des ennuis au boulot. Tu devrais être plus accommodant avec tes collègues. J’ai peur que…
Tu es encore fâchée pour hier soir ? Ne nie pas, ça se voit. C’est toujours pareil avec toi. J’ai l’impression d’être…
Chacune de ces phrases pourrait être prolongée par une scène de la vie conjugale ordinaire pimentée de reproches virulents, de phrases assassines, de vieux comptes à régler et d’une belle dispute comme bouquet final. L’intention de celui ou de celle qui initie la discussion n’est sans doute pas directement malveillante, mais on imagine sans peine la réaction du conjoint et la douloureuse escalade qui risque de suivre avec, de part et d’autre, deux grands sentiments de solitude. Vous avez certainement remarqué que ces scénarios sont construits sur un schéma répétitif : la communication commence par ‘’tu’’ et se poursuit par ‘’je’’. L’initiateur de la discussion imagine, pense, croit et exprime quelque chose de l’autre (tu n’as pas vu, tu n’es pas d’accord, tu es soucieux, tu es fâchée), s’abstient de demander confirmation et continue dans sa foulée, avec ses propres émotions et sentiments, sans se soucier vraiment de l’autre qui ne pourra que se défendre avant de lancer une contre-attaque. Il se sent doublement agressé : son conjoint se permet d’interpréter son attitude sans en connaître les fondements et lui adresse des reproches qui ne peuvent que lui paraître injustes et disproportionnés. Il risque fort de se lancer, lui aussi, dans des affirmations en ‘’tu’’ avant d’exprimer en ‘’je’’ toute sa rancœur.
Que se passe-t-il ? Pourquoi ce scénario, qui ne concerne pas que la vie conjugale, est-il si fréquent ? Peut-être sommes-nous tout simplement naturellement égocentriques et paresseux ! En fonction de ce que nous voyons, à partir de notre unique point de vue, nous nous contentons d’interpréter, d’imaginer et de croire pour construire un modèle auquel l’autre est sommé de correspondre. Nous lui imposons le tiroir et l’étiquette ! Tout ce processus est implicite, confus pour nous-mêmes et invisible pour l’autre : pas l’idéal comme prémices pour une bonne communication… Une proposition pour sortir de cet écueil ? Renverser le schéma, commencer en ‘’je’’ avant de passer au ‘’tu’’. Je clarifie d’abord ce qui vit en moi et je t’en fais part, ensuite je te demande ce que tu ressens par rapport à cela. Quel paradoxe : je dois d’abord me centrer sur moi-même pour pouvoir abandonner mon égocentrisme naturel ! Je dois savoir où j’en suis avec moi-même pour faire de la place pour qui tu es, comme tu es, sans projection et sans croyance. Pas toujours évident ? Non, bien sûr. Plus périlleux encore si nous voulons communiquer à propos de notre sexualité. Là nous aurons bien besoin du Wi-Fi, de la 4G et du Bluethooth !