L’année scolaire vient de commencer. Je rentre en 4e, et croyez-le ou non: JE STRESSE. Pas parce que je n’ai pas retrouvé dans ma classe mes amis de l’année passée. Pas parce qu’entre le prof de maths et moi c’est déjà galère. Pas parce que j’ai plein de boutons. Non, je stresse à cause de vous, Papa et Maman.
Par Diane Drory, psychologue et psychanalyste
Parfois j’ai le triste sentiment qu’à vos yeux, je ne suis qu’un bulletin sur pattes. Une seule chose vous importe: mes résultats scolaires. Et non qui je suis. Oui, bien sûr, au retour de l’école vous me demandez si la journée à été bonne, si tout va bien, mais vous ne me demandez pas comment se passe ma vie d’ado. À vos yeux, j’ai l’impression qu’elle se résume à… étudier. L’école n’est pas qu’un temple du savoir, c’est aussi un monde de rivalités sans pitié, un monde de violences, où plane la tentation de la drogue, la banalisation de l’alcool, l’angoisse du racket. Non, contrairement à ce que vous me répétez, mon avenir ne « dépend » pas uniquement de ma réussite scolaire, il dépend aussi de la façon dont je vais gérer mon quotidien dans cette école de vie. De comment aimer mon nouveau corps rempli d’élans bien plus questionnants que les cours, tant il vibre d’émotions, de désirs, de pulsions. Trop souvent on vole l’enfance des enfants, laissez-nous notre adolescence ! Vous n’avez de mots qu’à propos de notre futur, comprenez que pour nous c’est le présent qui importe ! Pourquoi notre avenir doit-il correspondre à vos rêves ? Svp, arrêtez de vivre à travers nous. Arrêtez de penser que votre bonheur dépend de notre réussite scolaire… Vivez votre vie et laissez-nous la nôtre!
Vous pensez que pendant l’été les soucis d’école se noient dans notre programme de vacances ? Eh bien, détrompez vous ! On stresse déjà pour l’année suivante, on angoisse à l’idée de vous confronter à une désillusion. Je ne veux plus entendre que je suis la honte de la famille parce que je n’ai eu que 50% en néerlandais. Mon bulletin de fin d’année était BON. Votre phrase m’a tué le moral et blessée au cœur. La crainte de vous décevoir, C’EST JAMAIS FINI…
Sachez que vos enfants, les prunelles de vos yeux, finissent par perdre confiance en eux tant ils ont peur de ne pas être l’enfant que vous avez désiré. Arrêtez de m’étiqueter uniquement en bonne ou mauvaise élève, ça ne fait que diminuer mon intérêt pour l’école. S’il vous plaît, arrêtez de mettre la barre trop haut.
Je viens de lire sur Internet qu’une critique blessante sur notre performance active des zones du cerveau impliquées dans l’anxiété et la frustration. Et que les énergies négatives perturbent l’attention et la mémorisation. Alors, Papa et Maman, si vous voulez vraiment me faire un immense cadeau lors de cette année scolaire, intéressez-vous à ma vie, aidez-moi à comprendre qui je suis, encouragez-moi, soutenez-moi et ne me balancez plus la menace de mon avenir, qui, sans de « beaux » points, fera de moi une « bonne à RIEN »…
Je vous aime
Enaïde