Désir érotique et désir d’enfant

Voici deux pulsions a priori complémentaires et qui semblent devoir toujours se renforcer mutuellement. J’ai tellement envie de toi que je veux un enfant de toi. J’ai une telle envie d’avoir un enfant que je te désire sans cesse. Mais, nous le savons, nos relations amoureuses ont tendance à ne pas suivre les chemins les plus simples !

Par Armand Lequeux, professeur émérite  de sexologie à l’UCL.

Ce désir d’enfant n’est évidemment pas toujours synchrone dans un couple, le tic-tac de l’horloge biologique ne résonne pas de pareille manière dans la tête, le cœur et le ventre des hommes et des femmes. Depuis la généralisation de la contraception, il ne suffit plus de se laisser aller pour faire un bébé, il faut prendre consciemment une décision qui engage toute la vie. Plusieurs vies ! Quand on sait à quel point cette notion d’engagement définitif fait peur à beaucoup de nos contemporains, on comprend qu’il puisse y avoir là pour certains couples une crise à traverser.

Il arrive que la grossesse tarde à s’annoncer et voici que le projet d’enfant risque de mettre la pulsion sexuelle à son service au point de l’étouffer dans un climat d’impatience anxieuse, de non-dits et de malentendus conjugaux. Voici venu le temps des rapports sexuels programmés en fonction du cycle menstruel et des injonctions médicales. Voici venu le temps des ruminations toxiques. Elle a envie de moi ou de ma semence ? Je me sens comme un étalon… Avant il ne pensait qu’à ça, mais depuis que j’ai arrêté la pilule il est moins intéressé par le sexe. Il le veut vraiment cet enfant, ou pas ?

Ensuite, si l’objectif n’est pas atteint, viendra le temps des tests et des analyses, alors la question de la cause de ce qui commence doucement à ressembler à de l’infertilité risque de se transformer en mauvais roman policier. Qui est coupable ? Elle ou lui ? Les deux ? Les équipes médicales ne vont évidemment pas inscrire cette phase exploratoire dans le registre de la culpabilité, mais celle qui n’ovule pas bien et celui qui n’a pas un bon sperme ne peuvent pas s’empêcher le plus souvent d’avoir l’impression de recevoir un mauvais bulletin ! Chacun risque alors de s’enfermer et de ruminer sa tristesse et son désarroi. Si j’en fais trop je plombe l’ambiance, si je me tais elle va croire que je m’en fous… Elle me protège, mais je sais qu’elle m’en veut… Il pourrait me quitter et faire un bébé avec une autre…

Il y a peu de choses aussi difficiles à partager pour des conjoints que ce tourbillon d’émotions, de croyances et de pensées parasites. Ils auront pourtant bien besoin de se soutenir mutuellement si dans le cadre d’une procréation médicalement assistée (PMA) ils sont amenés à traverser ce qui est souvent comparé à un parcours du combattant. Malgré l’encadrement par des équipes qui intègrent des psychologues et des sexologues, ce parcours reste semé d’embûches avec ses espoirs, ses déceptions, ses réussites et ses échecs. Les enquêtes nous apprennent que malgré l’absence de contre-indication médicale la moitié des couples cessent quasi complètement d’avoir des relations sexuelles pendant cette période de PMA comme si toute leur énergie était focalisée sur le projet procréateur au point d’épuiser totalement la pulsion sexuelle. Ce peut être grave pour l’équilibre futur du couple s’il feint de ne pas s’en apercevoir, si le sujet est tabou, mais ce peut aussi être une belle occasion de vivre la confiance et l’authenticité. Ce qui ne nous tue pas nous rend plus forts, disait Nietzsche. Je crois que ce n’est pas toujours vrai. La plupart du temps cela dépend de notre capacité à accepter ce qui survient et à nous engager à le vivre dans l’ouverture et le partage. Un beau challenge pour réconcilier notre désir érotique et notre désir de donner vie sous quelques formes que ce soit.

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