Qu’est-ce qu’un couple?

Je me souviens d’un séminaire de formation en prise en charge conjugale que j’eus l’occasion de suivre il y a quelques années. L’animatrice, une thérapeute conjugale renommée, nous avait demandé notre définition du couple.

Par Armand Lequeux, professeur émérite  de sexologie à l’UCL.

Après avoir accueilli nos réponses, elle nous a proposé de les oublier en nous assurant qu’elle écoutait ses consultants avec bien moins de préjugés depuis qu’elle s’était débarrassée de toute définition du couple. Nous avons refait l’exercice en décrivant ce qui pour chacun des participants du séminaire paraissait être le couple idéal. Nos réponses furent si différentes que nous dûmes admettre l’évidence : chacun porte en soi, en fonction de ses antécédents personnels et familiaux, de son cadre de vie et de ses expériences amoureuses, un modèle spécifique et singulier du couple et il est exclu de vouloir l’imposer aux autres lorsqu’on a le projet de les écouter avec bienveillance. Le but d’une prise en charge conjugale n’est bien entendu pas de formater les consultants et de prétendre les épanouir à notre manière, mais bien de les soutenir dans un travail de redéfinition de leur relation avec ses enjeux et ses projets propres.

Dessine-moi ce qui pour toi représente le couple idéal ! Cet exercice peut être réalisé entre conjoints. Ils seront le plus souvent surpris de découvrir que les deux maquettes proposées ne se ressemblent pas et paraissent même parfois incompatibles. Quoi ? Moi qui rêve de fusion, de présence, de transparence et d’absolue fidélité, je vis avec toi qui privilégies l’autonomie, la distance, le mystère et la contingence ? Me suis-je à ce point trompé/trompée sur ton compte ? C’est le moment d’être lucide et courageux afin d’admettre que pour l’essentiel notre choix amoureux n’eut rien de rationnel. Mon rêve de fusion s’est donc associé à ton besoin d’autonomie ? Mon besoin de transparence fut donc attiré par ton mystère ? Ma soif de présence m’a donc conduit à rencontrer ton besoin de distance ? Génial, non ? Nous sommes si peu pareils que nous ne risquerons guère de nous ennuyer ensemble ! C’est avec ces différences qui nous ont mystérieusement conduits à former un couple que nous pourrons continuer à le construire. Notre relation peut devenir, si nous le voulons, un processus vivant en croissance permanente.

Nous n’étions peut-être pas toujours parfaitement lucides au moment de la création de notre couple, mais nos premiers différends et nos premières incompréhensions nous ont ouvert les yeux : ça n’ira pas de soi, il y faudra travailler. C’est-à-dire écouter, dialoguer, faire en soi de la place pour l’autre, lui permettre de devenir lui-même donc non conforme le plus souvent à mon projet sur lui. Cette conception d’une vie à deux qui veut durer peut être appréhendée comme laborieuse et représenter un véritable deuil pour celles et ceux qui croyaient que l’amour ne se nourrissait que d’eau fraîche et de décoction de fleurs bleues. Qu’ils se rassurent, le travail conjugal n’empêche nullement par ailleurs la légèreté, l’humour, le brin de folie, l’emportement par la passion et la grâce du moment. Chaque couple est une aventure. On s’y embarque sans roadbook. Vive l’improvisation créatrice.

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Je me souviens d’un séminaire de formation en prise en charge conjugale que j’eus l’occasion de suivre il y a quelques années. L’animatrice, une thérapeute …