Quand l’actualité se présente, cela nous arrive de parler en famille de ce sujet et tous semblent assez ouverts et tolérants face à cette situation. Je ne pense donc pas provoquer un cataclysme en annonçant mon homosexualité. Pourquoi est-ce si compliqué de l’annoncer? François, 23 ans
Par Vanessa Greindl, psychanalyste
Cher François, votre question m’évoque une interpellation adressée par vous-même à vous-même. Peut-être me l’envoyer vous permettra de vous la poser, mais c’est vous et vous uniquement qui pourrez y répondre… Vous seul pourrez tenter d’explorer ce que le dire viendrait bousculer, chez d’autres,… ou chez vous ? Allons un peu plus loin dans votre courriel; vous ajoutez encore : « j’aime pourtant bien les filles aussi, mais je préfère les hommes, je ne sais pas très bien, je suis un peu perdu, je me suis toujours senti attiré par les garçons plus âgés, j’ai toujours pensé que j’avais des tendances homo… » Quelques petites remarques glissées çà et là dans votre e-mail éveillent une réflexion ; peut-être, le plus difficile pour vous aujourd’hui, n’est pas tant de l’annoncer que d’en faire, par une « annonce », une « vérité » presque scientifique et irréversible.
Vous sentez bien que la question de la sexualité est pour vous moins souple que pour certains autres, vous percevez bien votre attirance pour les deux sexes, vous ressentez depuis toujours un désir important vis-à-vis des garçons que vous avez eu l’occasion de côtoyer… Cela fait-il de vous un homosexuel, François ? Et votre peur de l’afficher ne vient-elle pas signer aussi votre inquiétude de fixer ainsi les choses ? N’oubliez pas que la plupart des adolescents ressentent des attirances relativement importantes pour des amis du même sexe, que cette période est si importante qu’elle permet d’asseoir le narcissisme à l’aide du « même » que l’on retrouve dans ces amitiés particulières.
Dire, serait-ce fermer la question ? Y répondre une fois pour toutes pour ne plus jamais se la poser ni l’ouvrir ? Et ne serait-ce pas dommage ? Dire, serait-ce établir une vérité sur votre identité ? Vous êtes bien plus qu’un homo ou un hétéro, mais un homme riche de tant d’autres qualificatifs ! Vous avez 23 ans, une belle situation, peut-être déjà un mode de vie adulte. Néanmoins, votre façon d’aborder cette problématique me semble témoigner d’une tentative de fixer les choses pour clôturer une question pénible. Et si, plutôt que de barricader ce thème par une réponse rapide et peut-être réductrice, vous essayiez plutôt de l’ouvrir et de le déployer ?