Alors que populisme et sexisme ont le vent en poupe, vient de paraître un Manuel du Genre féminin-masculin qui propose des pistes concrètes pour rétablir l’égalité des sexes dans le langage. Féminisons à tous vents, telle est l’invitation lancée par ce manuel et relayée
le 23 février prochain, lors d’une Journée d’étude centrée sur ce nouveau livre et sur le film
La Fémi-langue, réalisés par Patricia Niedzwiecki
Par Christiane Thiry
Au début de ses recherches sur la différenciation sexuelle, Patricia Niedzwiecki s’entendait dire que ses constats, trop pionniers, ne seraient peut-être entendus qu’au siècle et millénaire suivants. Début 2017, il semble néanmoins plus que nécessaire d’influer sur une société sexiste par divers moyens, dont les mots. Car les mots ont un genre ; un genre qui n’est pas neutre ; particulièrement dans la langue française. Un genre féminin et masculin qui, pour les êtres vivants, concorde avec leur sexe. Les mots ont donc un sexe, notamment les noms de personnes, de métiers et de professions : boulanger/boulangère, ouvrier/ouvrière, instituteur/institutrice, entraîneur/entraîneuse, etc. Sauf que, certains de ces métiers, par hasard ceux qui gravitent dans les sphères du pouvoir, ont perdu leur capacité de se mettre au féminin. Comme s’ils étaient réservés aux hommes…
Alors que notre société prône l’égalité entre les femmes et les hommes, le langage maintient un sexisme avéré ou plus subtilement ténu, accepté par la plupart des femmes, y compris par certain-e-s féministes qui voient dans le combat de la féminisation des noms de métiers un combat « d’arrière-garde », voire futile.
C’est à mettre à jour et à combattre tous les préjugés véhiculés par la langue que se consacre depuis de nombreuses années Patricia Niedzwiecki, chercheuse, auteure d’ouvrages comme Le langage au féminin, réalisatrice du film La Fémi-langue et cofondatrice de l’IRDECOF, Institut de Recherche pour le Développement de l’Espace Culturel Européen.
Fondé sur plusieurs décennies de recherche et d’enquêtes sur les comportements et les rôles féminins et masculins, le Manuel du Genre déchiffre les couches sédimentaires successives de préjugés et de stéréotypes accumulés au cours des siècles et millénaires précédents. Les contenus sexistes passés au crible, sous un angle non démuni d’humour, mettent en lumière les mécanismes inégaux et discriminatoires subliminaux en jeu dans tout événement de la vie quotidienne. Le phénomène n’est pas neuf, souligne l’auteure, puisque la pharaonne Hatshepsout – qui l’avait si bien compris-, se faisait décrire et appeler… au masculin, craignant, sinon, de se voir rejetée par son peuple, non habitué au pouvoir au féminin. Soutenu par l’Institut pour l’Égalité Femmes Hommes et la Ville de Bruxelles, Le Manuel du genre offre une vision déstéréotypée, peut-être idéale encore, propre à encourager l’émergence d’une société moins, voire non, sexiste. À l’analyse des rôles et comportements attendus dans nos sociétés, le Manuel et le DVD proposent en effet de reprogrammer des attitudes formatées dont parfois même nous n’avons pas (encore) conscience et de redéfinir des rôles ou des comportements genrés qui entraînent immanquablement une discrimination persistante, qui ne devrait plus être de mise à notre époque.
Le jeudi 23 février à midi et à 17h chez Amazone, 10, rue du Méridien à Saint-Josse : présentation du Manuel du genre et du DVD La Fémi-langue, avec Benoîte Groult, premier film de la Collection consacrée au Sexe des Langues.
Du 8 au 18 mars au Cinéma des Galeries à Bruxelles, salle 3 : projections de La Fémi-langue, avec Benoîte Groult. En collaboration avec Amazone : www.amazone.be.
Le Manuel du Genre féminin – masculin De Patricia Niedzwiecki, Irdecof Productions.
La Fémi-langue: Ce film met en scène les comportements féminins et masculins et leur représentation dans la société au travers du genre, du langage et de la symbolique des métiers et professions.