Pour son deuxième long métrage « Haute Couture », Sylvie Ohayon convoque deux femmes issues de classes sociales peu favorisées, mais que tout oppose, et les fait se rencontrer, s’apprivoiser puis s’adapter dans une comédie dramatique portée par la mode, l’amour et la passion. Haute Couture est un film généreux qui aborde des thèmes de société chers à sa réalisatrice : la banlieue, la transmission et les rapports humains.
De la banlieue aux ateliers Dior
Première d’atelier au sein de la Maison Dior, Esther (Nathalie Baye) participe à sa dernière collection de Haute Couture avant de prendre sa retraite et de retrouver sa banlieue. Dans le métro qui la ramène chez elle, elle se fait voler son sac par Jade (Lyna Khoudri), jeune fille de 20 ans qui, prise de remords, décide de lui restituer le sac qu’elle lui a volé. En colère, mais séduite par l’audace de la jeune fille et convaincue que cette dernière possède un don, Esther lui offre la chance d’intégrer les ateliers de la Maison Dior comme apprentie. L’occasion de transmettre à Jade le métier qu’elle exerce depuis toujours et s’apprête à quitter.
Derrière la beauté du geste
Ce qui débute comme un conte de fée cache en réalité des failles humaines plus profondes. L’altruisme d’Esther est avant tout pour elle un moyen de vaincre sa solitude et de renouer des liens semblables à ceux qui l’unissaient à sa propre fille, qu’elle ne voit plus. Mais surtout, former Jade lui permet de combler un manque, celui qu’elle va devoir affronter après cette dernière collection alors qu’elle éprouve le sentiment amer d’avoir raté sa vie personnelle. De son côté, Jade met les pieds dans un environnement qui n’est pas le sien et dont les codes lui échappent, tandis qu’elle n’a de cesse de secourir sa propre mère qui se noie dans la dépression. Se rapprocher d’Esther permet à la jeune fille de gagner une éducation et d’ouvrir les yeux sur un nouveau monde. Et quoi de mieux qu’un métier pour remettre du sens dans sa vie ? « L’idée d’apprendre un “métier”, et non pas un “job”, rejoint aussi la volonté, très actuelle, de se construire une colonne vertébrale. Un métier, au sens le plus noble du terme, c’est une activité dont on est fier et qui sert la communauté », explique la réalisatrice.
Rompre avec le déterminisme social et l’antagonisme « riches-pauvres »
Pour Sylvie Ohayon, la France est foncièrement une terre où tout est possible. Le message ? Qu’importe les diplômes et le milieu dont on est issu, il y aura toujours quelqu’un pour nous tendre la main. Et ce film vient nous prouver que l’histoire ne va pas toujours dans un sens : « J’ai été touchée par cette rencontre entre deux femmes issues de classes sociales peu favorisées, qui ont des préjugés l’une sur l’autre, et qui vont apprendre à les dépasser : ce n’était pas l’histoire d’une bourgeoise face à une fille des banlieues, ce n’était pas manichéen, et il y avait de la complexité dans le récit », explique Lyna Khoudri. Cette volonté de briser le plafond de verre et de vaincre le déterminisme social, tout en s’émancipant grâce à la bienveillance d’autres personnes, porte un film qui anoblit le travail des petites mains sans pour autant les opposer aux riches patrons, ce qui n’était pas le propos de la réalisatrice. « Je voulais avant tout filmer les couturières au travail et montrer que derrière la magnificence, il y a des gens normaux qui fabriquent de la magie. » Une magie qui se déploie sur 1 h 41, offerte par des actrices à l’humanité convaincante.
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Cet article a été écrit en étroite collaboration avec Cinéart.
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